Assurances : Publication du décret relatif à la distribution d’assurances
Le décret du 1er juin 2018 relatif à la distribution d’assurances, publié au Journal Officiel le 3 juin poursuit la transposition de la directive du Parlement européen et du Conseil du 20 janvier 2016 sur la distribution d’assurances, dite directive “DDA”, déjà initiée par l’ordonnance du 16 mai 2018 relative à la distribution d’assurances. Sans revenir sur le contenu de l’ordonnance, l’objet de cette présentation est de se focaliser sur les précisions apportées par le décret du 1er juin 2018. Ce décret entrera en vigueur le 1er octobre 2018, à l’exception de certaines dispositions sur la formation qui entreront en vigueur le 23 février 2019. Notion de distribution d’assurance Pour mémoire, l’article L.511-1 du code des assurances définit la notion de distribution d’assurances ou de réassurances comme “l’activité qui consiste à fournir des recommandations sur des contrats d’assurance ou de réassurance, à présenter, proposer ou aider à conclure ces contrats ou à réaliser d’autres travaux préparatoires à leur conclusion, ou, à contribuer à leur gestion et à leur exécution, notamment en cas de sinistre”. Le nouvel article R.511-1 du code des assurances, qui précise cette disposition, reprendra la même définition que celle qui définissait jusqu’à présent la notion d’intermédiation en assurance. Il précise, toutefois, ce qu’il faut entendre comme travaux préparatoires au sens de l’article L.511-1. Ces derniers sont définis comme “tous travaux d’animation de réseaux de distributeurs de produits d’assurance ou de réassurance ou d’organisation par un intermédiaire d’assurance du réseau d’intermédiaires d’assurance ou d’intermédiaires d’assurance à titre accessoire auquel il a recours”. Notion de rémunération La réglementation définit, de même qu’auparavant, la notion de distribution d’assurances comme une activité réalisée contre rémunération. Cette notion de rémunération est précisée à l’article R.511-3 du code des assurances, qui énonce qu’il ne faut plus seulement entendre par rémunération “tout versement pécuniaire ou toute autre forme d’avantage économique convenu et lié à la prestation d’intermédiation”, mais, plus largement, “toute commission, tout honoraire, tout autre type de paiement ou tout avantage de toute nature, économique ou autre, proposé ou offert en lien avec des activités de distribution d’assurances”. Document d’information L’article R.521-2 du code des assurances créé impose notamment que le document d’information prévu par l’article L.112-2 soit clair, exact et non trompeur. Les informations qui y seront contenues devront être communiquées au moyen d’un support durable autre que le papier, telle l’adresse électronique fournie par le client, même si un exemplaire papier devra aussi être remis gratuitement au client qui en fera la demande. Il devra, par ailleurs, à la lecture du nouvel article R.112-6 du code des assurances, comporter des précisions sur le type d’assurance et, en particulier, un résumé de la couverture d’assurance, y compris les principaux risques assurés, les plafonds de garantie et, le cas échéant, la couverture géographique et un résumé des risques non couverts, ainsi qu’un descriptif des obligations du souscripteur lors de la souscription, pendant la durée du contrat ou en cas de sinistre. Formation Si les textes transposant la directive “DDA” entreront en vigueur le 1er octobre 2018, le Gouvernement, agissant tant par voie d’ordonnance que par voie réglementaire, a étendu au 23 février 2019 l’entrée en vigueur des dispositions sur la formation des intermédiaires d’assurance et de réassurance et de leurs personnels. Ces acteurs devront alors remplir certaines exigences en matière de formation et de développement professionnels continus en y consacrant au moins quinze heures par an afin d’actualiser régulièrement les compétences nécessaires à l’exercice des fonctions qu’ils occupent. La liste de ces compétences sera déterminée ultérieurement par arrêté du ministre chargé de l’Economie. Quant aux prestations exigées, elles pourront être suivies en présentiel ou à distance, de façon continue ou séquencée, lors de séances consécutives ou non (article R.512-13-1 créé du code des assurances). Le décret précise, par ailleurs à ce titre, que les entreprises d’assurance et intermédiaires devront être en mesure de produire la liste des formations suivies par leur personnel.
Vente d’immeuble : Pacte commissoire
L’arrêt de la cour d’appel de Lyon, rendu le 15 mai 2018, vient alimenter le contentieux de la vente avec faculté de rachat devant d’analyser comme un acte commissoire interdit. En l’espèce, un emprunteur poursuivi en vente forcée de son bien immobilier au prix de 320 000 euros par sa banque devait obtenir du juge de l’exécution, l’autorisation de procéder à la vente amiable de ce bien, réalisée moyennant le prix le plus favorable de 380 000 euros. L’immeuble concerné était toutefois estimé à la somme de 820 000 euros aux termes même de l’acte réservant au vendeur une faculté de rachat au prix de 493 696 euros avant l’expiration du délai de deux, durant lequel le vendeur, qui se maintenait dans les lieux, devait payer une indemnité mensuelle de 2 938 euros. Rappelant que la vente avec faculté de rachat constitue un instrument de crédit, en ce qu’elle permet au propriétaire d’un immeuble de se procurer les fonds dont il a besoin par la vente de cet immeuble, tout en conservant l’espoir d’en retrouver la propriété, en restituant à l’acheteur le prix et ses accessoires, les magistrats estiment que l’opération peut constituer un acte commissoire prohibé lorsque, portant sur la résidence principale du vendeur, elle dissimule une opération de crédit et qu’elle a pour objet d’éluder les dispositions protectrices de droits des emprunteurs relatives au taux de l’usure. A cet égard, le prix de vente stipulé restant très éloigné des prix du marché, les magistrats en déduisent que la nature réelle de l’opération réside dans l’existence d’un prêt à caractère usuraire, caractérisé par la différence entre le prix de vente et le prix de rachat, compte tenu de la durée d’exercice de cette faculté, outre la rémunération supplémentaire qu’apportait à l’acheteur la perception d’indemnités représentant près de 9% du prix d’achat. La perspective d’une confirmation de l’acte irrégulier par son exécution en pleine connaissance de cause par le vendeur étant par ailleurs rejetée, l’annulation de la vente emporte alors obligation de restitution du prix perçu sans que l’acheteur ne puisse prétendre être indemnisé au titre de l’occupation du bien par le vendeur, censé en être toujours resté propriétaire. C’est une chose connue que “bien mal acquis ne profite jamais”, car l’annulation sert, au final, les intérêts du vendeur qui aura ainsi pu disposer gratuitement de la valeur de sa propriété pour désintéresser sa banque au moyen du prix perçu et conserver son bien immobilier !
Lutte contre le blanchiment : Rapport d’activité Tracfin
Tracfin a, le 21 juin 2018, publié son dernier rapport annuel d’activité. En 2017, il a reçu et analysé 71 070 informations, soit une hausse de 10% en 1 an, et 57% en 2 ans. Près de 96% des informations reçues par Tracfin émanent des professionnels déclarants, soit 68 661 déclarations de soupçons (DS). Il a réalisé 12 518 enquêtes, issues d’informations reçues en 2017 ou antérieurement. Ces enquêtes ont débouché sur l’externalisation de 2 616 notes (+38%), dont 891 notes à l’autorité judiciaire. Le rapport souligne que la progression d’activité est le fruit de la vigilance active des professionnels assujettis à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, notamment par une adaptation des dispositifs de conformité mis en place par certaines professions des secteurs non financiers. La participation des professionnels déclarants du secteur financier représente 93% du nombre de DS reçues en 2017. Parmi les professions financières, si le nombre de DS émanant des établissements de crédit est stabilisé à un niveau élevé (46 882), celui des établissements de paiement est en forte hausse (8 603, soit 68% de plus par rapport à 2016), comme celui des compagnies d’assurance ( 4 939 soit +54,3% par rapport à 2016). La participation des professions non financières augmente également (+23,4%) du fait notamment de l’accroissement du nombre de DS reçues en provenance des notaires (+34,2%) et des casinos (+54,6%). Le notariat atteint ainsi son score le plus élevé depuis 1998 et confirme sa place de premier contributeur dans le secteur des professions non financières devant les opérateurs de jeux. La hausse est également sensible pour les professionnels de l’immobilier (+111.9%). Cependant, le rapport regrette que, compte tenu du nombre de professionnels concernés, le volume des signalements effectués demeure insuffisant. Dans la continuité de 2016, la hausse du marché immobilier pouvait, selon Tracfin, laisser espérer une plus large activité déclarative de la part de ces professionnels. Concernant les huissiers de justice (+49.3%), le rapport souligne que la tendance haussière est à corréler avec l’implication de la Chambre nationale des huissiers de justice avec laquelle Tracfin travaille, en outre, à l’élaboration de lignes directrices conjointes relatives aux obligations des huissiers de justice en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. S’agissant des administrateurs et mandataires judiciaires (AJMJ), en constante augmentation ces dernières années, le nombre de DS s’est stabilisé entre 2016 et 2017. Tracfin indique cependant que la profession continue d’être un des déclarants les plus mobilisés du secteur non financier, à part presque égale avec les notaires, avec un nombre de professionnels beaucoup plus réduit. Des lignes directrices conjointes du Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires et de Tracfin, relatives aux obligations de AJMJ en matière de lutte anti blanchiment devraient être publiées courant 2018. Selon le rapport, pour 2017, le volume des DS adressées par les commissaires aux comptes et les experts-comptables reste faible par rapport au nombre global de professionnels en activité. De plus, eu égard au volume des flux financiers traités, au nombre important d’entreprises sollicitant les services des professionnels du chiffre et d’entités françaises bénéficiant d’un contrôle légal et à la variété des structures contrôlées, un potentiel déclaratif important reste à exploiter. L’année 2017 témoigne, cependant, de la qualité de certains signalements d’experts-comptables qui ont mis au jour des cas de fausses factures en lien avec des fraudes à la TVA. Les mouvements en compte courant d’associés sont également régulièrement repris dans les DS et permettent de déceler des cas d’abus de biens sociaux. On note, par ailleurs, en 2017, une progression des typologies d’escroquerie. Enfin, s’agissant des avocats, le rapport n’est pas “tendre” : “si l’année 2016 avait été marquées par la réception de quatre déclarations de soupçon en provenance des avocats, la profession a confirmé son indifférence pour le dispositif LCB/FT en n’adressant aucune déclaration de soupçon à Tracfin en 2017”; et de poursuivre: “il apparaît que la mobilisation de la profession en matière de lutte contre le blanchiment n’a été impulsée que par les autorités de régulation et les évolutions législatives et réglementaires”.
Banques : Evaluation des risques du système financier au 1er semestre 2018
Le 25 juin 2018, la Banque de France a publié son rapport sur l’évaluation des risques du système financier français au premier semestre 2018. Elle anticipe une croissance économique élevées en France (+1,8% en 2018, +1.7% en 2019, après +2,3% pour 2017) et identifie quatre principaux risques : – les risques liés à l’endettement du secteur privé : les risques liés à l’endettement des entreprises et des ménages sont jugés élevés. Ils se situent au premier rang des risques identifiés pour le système financier français, avec une perspective de hausse au cours des 6 prochains mois. Le taux d’endettement du secteur privé non financier continue de progresser et atteint 130,2% du PIB au 4è semestre 2017, ce qui correspond à 71,8% du PIB pour les sociétés non financières et 58,4% pour les ménages ; – les risques liés au marché : le risque de correction abrupte des primes de risque augmente dans un contexte où les valorisations sur les marchés financiers continuent leur progression : – les risques liés à l’environnement de taux d’intérêts en Europe : la possibilité d’une hausse brutale des taux d’intérêt longs serait une source potentielle de risque : – les risques liés aux changements structurels du système financier.
Détention provisoire : Correspondance
Saisi le 27 avril 2018 par le Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du premier alinéa de l’article 40 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 qui prévoit que “les personnes condamnées et, sous réserve que l’autorité judiciaire ne s’y oppose pas, les personnes prévenues, peuvent correspondre par écrit avec toute personne de leur choix” (CE. 11 avril 2018), le Conseil Constitutionnel a censuré l’absence de voie de droit permettant la remise en cause de la décision du magistrat conduisant à une méconnaissance du droit au recours juridictionnel effectif. L’association requérante soutenait que ces dispositions méconnaîtraient le droit à un recours juridictionnel effectif. Elle critiquait, d’une part, le fait que la décision par laquelle l’autorité judiciaire s’oppose à l’exercice, en détention, du droit de correspondre par écrit des personnes prévenues ne puisse être contestée. Elle relevait, d’autre part, que les motifs susceptibles de justifier cette opposition ne sont pas précisés. Il en résulterait également une méconnaissance du droit de mener une vie familiale normale et du droit au respect de la vie privée. Enfin, pour les mêmes motifs, ces dispositions seraient entachées d’une incompétence négative de nature à porter atteinte à ces droits. Le Conseil Constitutionnel, dans sa décision rendue le 22 juin 2018, considère que si l’article déféré à son examen reconnaît aux personnes placées en détention provisoire le droit de correspondre par écrit à toute personne de leur choix, ni ces dispositions, ni aucune autre disposition législative ne permettent de contester devant une juridiction une décision refusant l’exercice de ce droit. Il juge, qu’au regard des conséquences qu’entraîne ce refus pour une personne placée en détention provisoire, l’absence de voie de droit permettant la remise en cause de la décision du magistrat, conduit à une méconnaissance du droit au recours juridictionnel effectif protégé par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 selon lequel, il ne doit pas être porté d’atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction. Le Conseil Constitutionnel, en conséquence, et sans qu’il ne soit besoin d’examiner les autres griefs, déclare contraires à la Constitution les mots “sous réserve que l’autorité judiciaire ne s’y oppose pas” figurant au premier alinéa de l’article 40 de la loi du 24 novembre 2009. Sur les effets de la déclaration d’inconstitutionnalité, le Conseil considère que l’abrogation immédiate des dispositions contestées aurait pour effet de priver l’autorité judiciaire de toute possibilité de refuser aux personnes placées en détention provisoire de correspondre par écrit et qu’elle entraînerait ainsi des conséquences manifestement excessives. Ainsi, tout en reportant au 1er mars 2019 la date de cette abrogation afin de permettre au législateur de remédier à l’inconstitutionnalité constatée, il énonce une réserve transitoire imposant, dans l’intervalle, que les personnes placées en détention provisoire puissent contester devant le président de la chambre de l’instruction, les décisions de refus de l’autorité judiciaire.
Protection des consommateurs : Action de groupe
S’il revient au juge de la mise en état de vérifier que l’assignation délivrée sur le fondement de l’article l.423-1 du code de la consommation, qui permet à une association de défense des consommateurs représentative au niveau national et agréée d’agir devant une juridiction civile afin d’obtenir réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs placés dans une situation similaire, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 14 octobre 2015, expose expressément des cas individuels au sens de l’article R.423-3, devenu R.623-3 du même code, il ne lui appartient pas d’en apprécier la pertinence. Selon la Cour de Cassation, la cour d’appel a exactement retenu que l’absence éventuelle de représentativité des cas individuels exposés dans l’assignation arguée de nullité, de même que la diversité des conditions générales des contrats d’assurance applicables à ceux-ci, constituent des moyens sur lesquels le juge de la mise en état ne peut se prononcer. En l’espèce, l’association Consommation, logement et cadre de vie (association) a assigné, sur le fondement de l’article L.423-1 du code de la consommation, l’Association générale interprofessionnelle de prévoyance et d’investissement (le souscripteur) et la société Axa France (assureur) aux fins d’obtenir la réparation de divers préjudices subis pas un groupe d’adhérents et de bénéficiaires d’un contrat d’assurance sur la vie dénommé “contrat compte libre épargne et de retraite”. Le souscripteur et l’assureur ont saisi le juge de la mise en état aux fins de voir annuler l’assignation. (Cass. 27 juin 2018).