Heures supplémentaires : Reconnaissance de l’existence d’heures supplémentaires
Les heures supplémentaires doivent être rémunérées par l’employeur. En principe, le salarié effectue de telles heures à la demande expresse de l’employeur. Parfois pourtant, un accord implicite ou une quantité de travail importante suffit pour l’existence d’heures supplémentaires soit reconnue. Les heures supplémentaires sont des heures de travail accomplies au-delà de la durée légale du travail ou de la durée considérée comme équivalente (article L.3121-28 du code du travail). Elles sont dues à toutes les catégories de salariés, à l’exception des cadres dirigeants et des salariés qui sont soumis à une convention individuelle de forfait annuel en jours (Cass. 3 novembre 2011). Les heures supplémentaires sont effectuées à la demande de l’employeur (Cass. 24 février 2004). Un salarié ne peut pas, de sa propre initiative, décider d’effectuer des heures supplémentaires et en réclamer ensuite le paiement, sauf contexte de surcharge de travail particulière qui ne lui donne pas d’autre choix que de travailler plus. L’employeur doit respecter un contingent annuel d’heures supplémentaires qui est fixé à 220 heures, sauf si un accord collectif fixe un volume distinct (article D.3121-24 du code du travail). S’il demande à un salarié d’effectuer des heures au-del) de ce contingent, il devra lui accorder, en plus du paiement des majorations pour heures supplémentaires, une contrepartie obligatoire sous forme de repos (article L.3121-30 du code du travail). L’employeur a, en outre, certaines obligations vis-à-vis des représentants du personnel. Si le volume du contingent a été fixé par accord collectif, les représentants du personnel sont simplement informés des heures supplémentaires effectuées dans la limite du contingent et consultés sur les heures excédant celui-ci (article L.3121-33 du code du travail). En revanche, en cas d’application du contingent réglementaire, les représentants du personnel sont obligatoirement consultés une fois par an sur ses modalités d’utilisation et son éventuel dépassement (article L.3121-40 du code du travail). Le salarié ne peut pas reprocher à l’employeur d’avoir cessé de lui demander d’effectuer des heures supplémentaires ou de lui en demander moins qu’aux autres, en invoquant la baisse de sa rémunération. Effectuer des heures en plus n’est pas un droit pour un salarié. L’employeur peut y mettre fin dès qu’il estime que cela n’est plus nécessaire, sauf engagement contraire dans le contrat de travail (Cass. 10 mars 1998). En principe, le salarié ne peut pas refuser d’effectuer des heures supplémentaires lorsque l’employeur lui en fait la demande. Cela relève du pouvoir de direction de ce dernier et non d’une modification du contrat de travail du salarié qui nécessiterait son accord (Cass. 9 mars 1999). Dans ces circonstances, une sanction du salarié, pouvant aller jusqu’au licenciement, est possible (Cass. 26 novembre 2003). La donne change si le refus du salarié est justifié par le fait que, par exemple, l’employeur ne rémunère pas les heures supplémentaires (Cass. 7 décembre 1999) ou si ce refus est exceptionnel et lié au fait que le salarié n’a pas été prévenu suffisamment tôt pour pouvoir s’organiser (Cass. 20 mai 1997). La demande de l’employeur d’effectuer des heures supplémentaires peut aussi avoir un caractère implicite aux yeux des juges (Cass. 20 mars 1980). L’absence de demande préalable n’exclut donc pas en soi l’existence d’un accord tacite de l’employeur à l’accomplissement d’heures supplémentaires (Cass. 8 juin 2016). C’est par exemple le cas lorsque l’employeur a connaissance du contenu des fiches de temps établies à sa demande par le salarié et ne s’est pas opposé à l’exécution desdites heures (Cass. 2 juin 2010). C’est aussi le cas s’il laisse régulièrement le salarié prolonger son temps de travail sans lui donner d’instruction contraire (Cass. 31 mars 1998). En revanche, le salarié qui décide de ne pas profiter de la pause repas dont il dispose, et pour laquelle il n’a pas été prévu qu’il doive rester à la disposition de l’employeur, ne peut pas réclamer des heures supplémentaires qui auraient été effectuées sur la base d’un accord tacite (Cass. 9 mars 1999). Le salarié peut prouver l’accord tacite de l’employeur en produisant des relevés de pointage faisant apparaître de nombreuses heures supplémentaires (Cass. 19 janvier 1999). Les heures supplémentaires sont aussi considérées comme tacitement demandées par l’employeur lorsque la quantité ou la nature du travail demandée au salarié lui impose de rester au-delà de la durée normale de travail (Cass. 6 avril 2011). Toute heure supplémentaire expressément demandée par l’employeur ou tacitement acceptée par lui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent (article L.3121-28 du code du travail ; Cass. 16 mai 2012). L’employeur ne peut pas conditionner ce paiement à un accord explicite préalable à l’exécution des heures supplémentaires, même si une telle exigence a été inscrite dans le contrat de travail (Cass. 9 juillet 2014). Pour les mêmes raisons, une procédure imposant l’accord préalable du chef de service pour exécuter des heures supplémentaires est inopérante (Cass. 2 juin 2010). Enfin, en cas de défaut de paiement des heures supplémentaires, le salarié peut saisir les juges pour y contraindre l’employeur. Il peut aussi prendre acte de la rupture aux torts de l’employeur. Dans ces circonstances, lorsque la prise d’acte est reconnue comme justifiée, elle produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. 26 janvier 2017). L’employeur risque aussi des poursuites pour travail dissimulé s’il a intentionnellement indiqué sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué par le salarié (article L.8221-5 du code du travail).
Succession : Ouverture
L’arrêt constate que la succession comprend des biens immobiliers situés en France et retient que ceux-si sont soumis, par application de la règle de conflit édictée à l’article 3 alinéa 2 du code civil, à la loi française. De ces constatation et énonciation, la cour d’appel a exactement déduit, sans méconnaître l’autorité attachée au jugement d’exequatur, que la dévolution successorale desdits immeubles devait tenir compte des règles de la réserve héréditaire, laquelle, d’ordre public interne, ne pouvait être écartée par des dispositions testamentaires établies selon la loi du domicile du défunt et régissant son statut personnel. (Cass. 4 juillet 2018).
Succession : Don manuel
En outre, le don manuel d’argent au moyen de la remise d’un chèque suppose la volonté du tireur de se dessaisir de manière irrévocable au profit du bénéficiaire de la propriété de la provision. En l’espèce, le bénéficiaire ayant lui-même porté le montant sur le chèque litigieux, la cour d’appel se devait de rechercher l’intention libérale du défunt. (Cass. 4 juillet 2018).
Crédit d’impôt intéressement : Remise en cause du recentrage
Le crédit d’impôt intéressement a été recentré sur les entreprises employant moins de 50 salariés à compter de 2011. Une société mère employant au moins 250 salariés, privée du dispositif des mesures transitoires, a réclamé la restitution du crédit d’impôt qu’elle estimait perdu. Le dispositif du crédit d’impôt intéressement permet aux entreprises qui ont conclu en faveur de leurs salariés des accords d’intéressement entre le 4 décembre 2008 et le 31 décembre 2014, ou des avenants portant sur des accords en cours au 4 décembre 2008, de bénéficier d’un crédit d’impôt imputable sur l’impôt sur les bénéfices et calculé en fonction des primes d’intéressement dues au titre de chaque exercice (article 244 quater T du code général des impôts ; loi du 3 décembre 2008). Le dispositif a été réaménagé en 2011 et recentré sur les entreprises employant habituellement moins de 50 salariés (loi du 29 décembre 2010). Un régime transitoire a été prévu pour les entreprises employant entre 50 et 249 salariés. En revanche, les entreprises employant au moins 250 salariés ont été complètement exclues du dispositif, s’agissant des primes d’intéressement dues au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011 (loi du 29 juillet 2011). Dans l’affaire, plusieurs filiales d’un groupe fiscalement intégré employant au moins 250 salariés avaient signé en juin 2009 un accord d’intéressement applicable à compter du 1er janvier 2009. Les accords d’intéressement étant en principe valables pour une durée de 3 ans (article L.3312-5 du code du travail), les filiales estimaient qu’elles auraient dû en bénéficier jusqu’au 31 décembre 2011. Toutefois, ces sociétés se sont vues refuser le bénéfice du crédit d’impôt intéressement, sur le fondement de la “petite rétroactivité” liée au changement apportée par la loi de finances pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2011. Les sociétés ont fait valoir que ces modifications légales les avaient privées de l’espérance légitime de bénéficier du crédit d’impôts qu’elles estimaient avoir perdu. Cet argument est fondé sur l’article 1 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui pose le principe du droit au respect de ses biens. Selon la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), l’espérance légitime s’analyse comme la croyance légitime du maintien d’un régime fiscal favorable pour le contribuable. Une personne ne peut toutefois prétendre au bénéfice de ces dispositions que si elle peut faire état de la propriété d’un bien qu’elles ont pour objet de protéger et à laquelle il aurait été porté atteinte. A défaut de créance certaine, l’espérance légitime d’obtenir une somme d’argent doit être regardée comme un bien au sens de ces stipulations (CEDH, 28 septembre 2004). Le Conseil d’Etat a déjà consacré le principe d’espérance légitime en droit français (CE. 18 novembre 2008). Il a ainsi, par exemple, reconnu l’existence d’une espérance légitime du fait de la croyance par le contribuable du maintien d’une jurisprudence du Conseil d’Etat le favorisant. (CE, 21 octobre 2011). L’atteinte à l’espérance légitime du contribuable est caractérisée lorsque le législateur remet en cause un régime fiscal garanti pour une période limitée dans le cadre d’un dispositif incitatif (CE, 9 mai 2012). En l’espèce, la Cour administrative d’appel avait rejeté la demande des sociétés, au motif que le dispositif du crédit d’impôt ne comportait aucune indication de durée et n’avait pas pour objet d’autoriser ses bénéficiaires à imputer le crédit d’impôt sur un exercice autre que celui au titre duquel sont versées les primes d’intéressement (CAA Versailles, 20 juillet 2017). Toutefois, le Conseil d’Etat a écarté cet argument et retenu que les accords d’intéressement sont conclus pour une durée triennale. Dès lors, il retient que les dispositions fiscales, éclairées par les travaux préparatoires, étaient de nature à laisser espérer leur application sur l’ensemble de la période triennale pour laquelle est conclu un accord d’intéressement (CE. 6 juin 2018). Par suite, en excluant les entreprises de plus de 250 salariés du dispositif à compter de l’année 2011, le Conseil d’Etat retient que le législateur a privé la société et ses filiales d’une espérance légitime d’en bénéficier jusqu’au terme de la période triennale d’intéressement, qui courait de 2009 à 2011. L’atteinte à l’espérance légitime du contribuable ne suffit pourtant pas pour écarter la loi. En effet, le principe d’espérance légitime ne fait pas obstacle à ce que le législateur adopte de nouvelles dispositions remettant en cause, même de manière rétroactive, des droits patrimoniaux découlant de lois en vigueur. Le législateur doit toutefois ménager un juste équilibre entre l’atteinte portée à ces droits et les motifs d’intérêt général susceptibles de la justifier. Il appartient à la Cour administrative d’appel de Versailles, devant laquelle l’affaire est renvoyée, de se prononcer sur ce point.
Elections professionnelles : Isoloir facultatif
Lorsque les élections professionnelles se déroulent par vote à bulletin secret sous enveloppe (article L.2314-6 du code du travail), les électeurs doivent bénéficier d’un dispositif permettant l’isolement. (Cass. 26 mai 1998) Pour autant, l’obligation de respecter et d’assurer le secret du vote n’impose pas, au sens strict, l’installation “d’isoloirs”, comme ceux utilisés pour les élections politiques. Par exemple, offrir la possibilité de s’isoler derrière un rideau avec un bureau inoccupé en face de celui où se déroulent les élections, suffit aux yeux des juges (Cass. 12 octobre 2000). La Cour de Cassation rappelle ce principe en confirmant le jugement du tribunal d’instance qui avait rejeté une demande d’annulation des élections, fondée sur des conditions d’isolement défectueuses, en l’absence de dispositif d’isolement. (Cass. 28 mars 2018).
Réforme de la justice : Mesures sociales
Le projet de réforme de la Justice pour 2018-2022 permettrait aux pouvoirs publics de procéder par voie d’ordonnances pour certains de ses aspects. Elle touche les procédures civiles, pénales et administratives. Les principales mesures intéressant le droit social sont les suivantes : – Représentation par avocat étendue : la représentation obligatoire par avocat serait étendue. A ce titre, le contentieux des élections professionnelles relèverait de la représentation obligatoire par avocat. En matière de sécurité sociale, la représentation par avocat deviendrait obligatoire pour les appels formés à compter du 1er janvier 2019 (date d’entrée en vigueur de la réforme des juridictions sociales). – Représentation en l’absence d’avocat : en matière prud’homale, il est déjà prévu que les parties peuvent se faire représenter par leur concubin ou la personne avec laquelle elles ont conclu un Pacs, lorsque le recours à un avocat n’est pas obligatoire (loi du 20 décembre 2007). Le texte ajouterait la possibilité, lorsque le ministère d’avocat n’est pas obligatoire ou en deçà d’un certain montant, de se faire assister ou représenter devant les tribunaux de grande instance par un avocat, son conjoint, son concubin ou la personne avec laquelle il a été conclu un Pacs, ses parents ou alliés en ligne directe, ses parents ou alliés en ligne collatérale jusqu’au 3ème degré inclus, les personnes exclusivement attachées à son service personnel ou à son entreprise. Cette mesure pourra concerner les litiges de la sphère sociale relevant de la compétence du TGI. – Saisies sur salaire : une fraction de la rémunération d’un salarié est saisissable ou cessible (articles L.2352-1 et suivants du code du travail). La caisse des dépôts et consignations serait dotée d’une nouvelle mission : celle de recevoir, gérer et répartir entre les créancier saisissants les sommes versées par le tiers saisi au titre des rémunérations du travail. – Justice dématérialisée, simplifiée et largement diffusée : un certain nombre de dispositions auraient pour objectif de mettre en place une procédure de dématérialisation des litiges et de saisine des juridictions, sous certaines conditions. En droit social, par exemple, lorsque le tribunal compétent est le TI ou le TGI, la mise en l’état de l’affaire et le jugement pourraient avoir lieu en dehors de toute audience, sauf si le juge en décide autrement. Même les victimes d’infractions pénales pourraient, dans certains cas, porter plainte en ligne.
Lutte contre la fraude : Mesures sociales
Le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude traite de l’action contre la fraude en matière douanière, fiscale et sociale. Les principales mesures intéressant le domaine social sont les suivantes : – Echanges d’information : le projet de loi prévoit de renforcer les échanges d’information entre différents organismes. Des agents de contrôle de l’inspection du travail, des agents des URSSAF et des agents des caisses de MSA, individuellement désignés et dûment habilités, bénéficieraient d’un droit d’accès direct aux informations contenues dans les fichiers de l’administration fiscale. Cet accès se ferait pour les besoins de l’accomplissement de leurs missions de contrôle et de recouvrement portant sur les infractions relatives au travail illégal. Les inspecteurs et contrôleurs du travail pourraient aussi être destinataires des informations contenues dans le répertoire national commun de la protection sociale pour la recherche et les constatations d’infractions de travail illégal et de fraudes sociales. – Amende administrative : une nouvelle amende de nature administrative serait créée au niveau de la sécurité sociale à l’encontre de professionnels conseil à caractère juridique, financier ou comptable, personne détenant des biens ou fonds pour le compte d’un tiers) ayant intentionnellement fourni à un cotisant une prestation ayant directement contribué à la commission d’un abus de droit ou à la dissimulation d’un abus de droit. L’amende serait due dès la notification des rectifications pour abus de droit adressée au cotisant par l’organisme de recouvrement. Elle s’élèverait à 10 000 €. Le directeur de l’URSSAF ou de la MSA lésée devrait notifier les faits reprochés à la personne en cause, ainsi que le montant de la pénalité envisagée, pour qu’elle puisse présenter ses observations écrites. Dans un tel cas, ce n’est qu’après avoir répondu que le directeur de l’organisme pourrait prononcer la pénalité et la notifier par mise en demeure. Dans tous les cas, si les rectifications venaient à faire l’objet d’un dégrèvement ou d’une décharge pour un motif lié à leur bien-fondé, il en irait de même de l’amende prononcée. – Obligation déclarative : les plateformes de l’économie collaborative auraient une obligation déclarative renforcée pour les revenus perçus à compter de 2019.